Un mai 62 à la capitale
Lundi 25 novembre, 16h30 : Le joli mai , Chris Marker
« Paris était alors une ville si belle que bien des gens préféraient y être pauvres plutôt que riches partout ailleurs »
« La scène se passe au mois de mai 1962 (juste après les accords d’Évian), désigné par certains, à l’époque, comme le premier printemps de la paix ». Au fil des rencontres, la caméra va montrer les Parisiens dans leur vie quotidienne, afin de composer un portrait politique, social et culturel de la France de l’année 1962.
Remise en contexte
Ce mois de mai 62 à Paris est un peu particulier. C’est le premier mois de paix depuis sept années avec l’achèvement de la guerre d’Algérie et la signature des accords d’Evian.Le long et terrifiant conflit a cependant laissé des traces dans une France encore largement ouvrière, où le communisme le dispute à la religion, où la consommation nouvelle et croissante des biens d’équipement accompagne peu à peu la diminution de la misère et la disparition des bidonvilles, où le racisme envers les Arabes et les Noirs comme la place réservée aux femmes attestent d’une société corsetée et repliée.
Prière sur la Tour Eiffel
Dans la première partie du film, qui s’intitule, sans qu’on sache trop pourquoi, Prière sur la Tour Eiffel, on va voir ce qu’est le Paris de ce printemps (au demeurant météorologiquement glacial, ce qui est rappelé maintes fois) en interrogeant au fil des rues, avec le mépris habituel des intellectuels de gauche, le brave populo qui ne songe qu’à gagner un peu plus de sous, pour avoir une existence davantage pépère, en s’étonnant qu’il ne se passionne pas pour la marche du monde mais pour son propre bonheur, tenu alors pour égoïste et petit bourgeois.
Le retour de Fantômas
La deuxième partie se centre sur un pays qui se porte extrêmement bien et a toutes raisons de se porter de mieux en mieux l’ombre terrible de la Vertu. Elle n’a d’autre objectif que de démontrer que la prospérité apparente, le calme et la sérénité, l’espérance en l’avenir qui règnent en en France, aux temps conjugués du Général de Gaulle et de Georges Pompidou ne sont que d’abominables faux-semblants.
Les intervenants de ce documentaire sont vraiment bien choisis, on a ainsi droit à plein de grands moments, drôles ou simplement forts.
Ça commence par des questions simples, générales, comme : « Qu’est-ce que vous faîtes là ? » ; « Quel événement vous a marqué au cours de ce mois de Mai ? », puis on arrive à des questions plus philosophiques, qui grâce aux réponses parfois imprévisibles dressent à merveille le portrait des tranches de vie qu’on nous montre : « Que représente l’argent pour vous ? » ; « Qu’est-ce que c’est que d’être heureux ? ».
Et c’est ainsi que le portrait de Paris en général est fait, une ébauche de la vie à la capitale au (joli) mois de mai 1962. Yves Montand qui susurre presque un poème et Paris qui s’allume et qui s’éteint. Des travellings dans les rues vides, des joies de vivre, de l’aigreur, De Gaulle, le communisme. Le tout avec le timbre et le vocabulaire Français de l’époque, tristement disparus.