Avez-vous déjà entendu parler de ce terme de « privacy paradox » ? Il se trouve qu’avec l’évolution d’internet et des réseaux en tout genre, nous en parlons de plus en plus.
Mais, aujourd’hui, plus que jamais, ce terme, que l’on traduit « paradoxe de la vie privée » en français, est au coeur d’un phénomène qui fait couler beaucoup d’encre. En effet, avec l’affaire de la Cambridge Analytica et Facebook, l’atteinte à la protection des données privées et leur collecte a attisé les flammes et a créé des mouvements contestataires sur le net, mettant ainsi en avant la « privacy paradox ».
Étymologie et origines
Privacy : /ˈpraɪvəsɪ/ : l’intimité, dans notre contexte, nous parlerons de la vie privée.
Les définitions les plus courantes de la privacy sont les suivantes : « le droit pour les individus de déterminer la nature et l’étendue avec lesquelles les informations les concernant peuvent être communiquées aux autres » (Westin, 1967) ou encore « la capacité de l’individu à contrôler personnellement les informations le concernant » (Stone et al., 1983).
Paradox : /ˈpærəˌdɒks/ : facilement traduisible, paradoxe. Vient du grec paradokson, de para, à côté, et doksa, opinion.
La « privacy paradox » en quelques mots ?
Alors au final, pourquoi parle-t-on de « privacy paradox » et qu’est-ce que cela signifie réellement ? Pour Patricia A. Norberg, co-auteur de The Privacy Paradox: Personal Information Disclosure Intentions versus Behaviors, on peut entendre ainsi la « privacy paradox » comme étant la représentation de la relation entre les intentions des individus de divulguer des renseignements personnels et leurs comportements réels de divulgation de renseignements personnels.
Le paradoxe réside dans le fait qu’on attend plus de protection de notre vie privée et de nos données personnelles sur Internet alors même que nos comportements individuels en ligne laissent croire le contraire.
Voilà pourquoi, l’affaire Cambridge Analytica fait autant de bruit. Le fait que les données privées Facebook de 2,13 milliards d’utilisateurs se soient retrouvées entre les mains de la Cambridge Analytica montre un manque de sécurité de nos contenus. Les utilisateurs du réseau social se posent des questions et n’ont plus confiance en Facebook. Le fameux paradoxe de la vie privée se retrouve ici. Les utilisateurs doivent-ils se sentir coupables d’avoir diffusé autant d’informations à leur égard ?
Les origines du terme
Naît le débat autour de la célèbre notion de privacy paradox (Norberg et al., 2007 ; Spiekermann et al., 2001) qui voit un grand nombre d’individus, y compris les plus préoccupés d’entre eux, accepter de fournir des informations personnelles à un e-commerçant, y compris des données de nature sensible voire intime, et parfois même en l’absence de motif « légitime ». De telles divergences entre ce que les gens pensent et la manière dont ils agissent dans la réalité sont largement connues et existent dans de nombreux domaines de recherche autres que celui de la vie privée. Elles seraient notamment liées aux aspects sociaux et cognitifs de la prise de décision (Simonson et al., 2001).
(Voir l’article suivant : Lancelot Miltgen, C. (2011). Vie privée et marketing: Étude de la décision de fournir des données personnelles dans un cadre commercial. Réseaux)
Nous voyons donc que « privacy paradox » est un terme largement utilisé depuis déjà de nombreuses années.
Pour Dominique Cardon, le sociologue français, « il y a un espace nouveau qui s’est constitué entre le caractère public des médias et l’intimité des gens. Cela ne veut pas dire que les gens livrent tout. Penser que c’est la vie privée des individus, c’est se tromper ».
C’est ce qu’il vient à appeler, un « clair-obscur », dans un entretien avec RSLN, Regards sur le numérique, en 2010.
Quels enjeux pour l’industries des médias et de la communication ?
Le contexte de « privacy paradox » est donc au centre de l’attention dès lors que nous nous trouvons sur les réseaux sociaux.
Qu’est-ce que les géants d’Internet peuvent proposer pour assurer la protection des données privées de tous les utilisateurs, tout en sachant que ce paradoxe persiste et que ces utilisateurs n’ont pas peur de dévoiler toujours plus leur vie privée ?
Dans de nombreuses recherches, il a été possible d’analyser la « privacy paradox » et de voir qu’elle se dévoile selon deux aspects à prendre en compte : le rôle du « knowledge deficiency » et de la « psychological distance » d’après les théoriciens Culnan MJ, Armstrong PK en 1999 mais aussi Dinev T, Hart P en 2006. À la suite de leurs recherches, a été mis en place le « Privacy Calculus Theory », que l’on peut traduire « théorie de calcul de confidentialité ».
Finalement, il en viendrait aux utilisateurs réseaux de respecter une bonne « privacy behavior », leur comportement est le centre névralgique de ce paradoxe, entre ce qu’ils font de leurs données et la protection qu’ils souhaiteraient avoir pour ces données.