Cet article reprend les propos énoncés par Sophie Jehel, CEMTI, Université Paris 8, le 06/12/2018 lors du colloque international « Culture des médias numériques » au campus Fonderie de Mulhouse.
Comment éduquer aux médias et à l’information la jeunesse d’aujourd’hui ? Tout d’abord, Sophie Jehel nous donne un peu de définition. L’EMI sont les compétences, le savoir et l’appréhension offrant aux utilisateurs la possibilité d’avoir accès aux médias et l’information de manière sûre et efficace. De cette manière, un utilisateur « éduqué » est à même de parfaire ses recherches et d’utiliser au maximum de ses capacités les outils des nouvelles technologies de l’information et de la communication. Alors, comment former des personnes, c’est la question que s’est posée Sophie Jehel en réalisant une enquête à l’attention des adolescents issus de divers milieux sociaux. La problématique de sont approche est d’orienter cette formation plutôt sur la notion de capabilité, donc de pouvoir utiliser les NTIC mais aussi et surtout d’avoir la possibilité d’être un acteur pouvant faire valoir ses droits, au-delà de l’image de l’internaute classique qui se content d’utiliser l’outil sans en comprendre les enjeux et sa place. L’exemple est donné que par rapport aux maths, l’EMI possède une dimension politique de part notamment la régulation et, plus récemment la sous-régulation de l’internet en 2007 par le conseil de l’Europe. Ces derniers prônant qu’internet est un média libre et que la régulation irait à l’encontre de l’essence même du média alors qu’au sein de celui-ci, les contenus audiovisuels sont partout et ceux-ci sont, paradoxalement, nettement plus régulés.
Alors, pourquoi capabilité plutôt que compétence. D’après Sophie Jehel, l’approche par compétence possède de nombreuses failles à commencer par le fait que ce concept soit issu du monde de l’entreprise néo-libérale et que donc, cela reviendrait à définir un internaute, quel que soit sont âge comme un entrepreneur possédant des compétences comme la polyvalence ou la flexibilité sans pour autant qu’il comprenne le pourquoi du comment du média ou de l’information qu’il traite. Cette approche très professionnelle semble peu adaptée au contexte éducatif. Aussi, sans inculquer la réflexion au procédé d’apprentissage, le risque d’adhésion à des stéréotypes est à entrevoir, un utilisateur non avertis est sujet à de la prise d’information sans confirmation, il peut donc être une cible de choix pour les fakes news par exemple.
La finalité est d’éduquer au média et à l’information non pas de manière neutre, mais en comprenant la situation des élèves comme leur contexte familial, les inégalités dont ils peuvent être victimes. De plus les amener à effectuer un travail émotionnel sur eux même et à ne pas tomber dans des schémas classiques de réception des images peut permettre à la jeunesse d’être des utilisateurs acteurs, avertis et pouvant utiliser les médias aux maximum de leur capacité tout en comprenant la place qu’elle a au sein de ces derniers.